Un déplacement hautement symbolique à Agadez
Le président nigérien a effectué cette semaine une visite remarquée dans la région d’Agadez, au nord du pays. Cette zone stratégique abrite certains des plus importants gisements d’uranium du Niger, longtemps exploités par la société française Orano (anciennement Areva). Son déplacement intervient dans un contexte de rupture diplomatique et économique entre Niamey et Paris, marqué par la récente nationalisation de la Somaïr et la reprise du vaste projet d’Imouraren.
Fin d’une ère : le Niger reprend la main sur ses ressources
La décision des autorités nigériennes de placer les actifs miniers sous contrôle national a profondément modifié le paysage énergétique et géopolitique du pays. La Somaïr, pilier historique de l’exploitation de l’uranium depuis les années 1970, n’est plus dirigée par Orano, tandis que le projet Imouraren – longtemps retardé – est désormais relancé sous gestion nigérienne. Cette reprise de souveraineté économique est présentée par le gouvernement comme une étape essentielle vers la maîtrise totale de ses ressources stratégiques.
Orano contre-attaque sur le terrain juridique
Face à cette redistribution des cartes, Orano, dont plus de 90 % du capital est contrôlé par l’État français, a engagé plusieurs procédures d’arbitrage international. L’objectif : empêcher le Niger de vendre l’uranium produit par la Somaïr, notamment un stock estimé à environ 1 300 tonnes de concentré, pour une valeur marchande avoisinant 250 millions d’euros. L’entreprise soutient que ces ressources restent contractuellement liées à des accords antérieurs et qu’un transfert unilatéral de leur propriété violerait les engagements initiaux.
Des enjeux financiers et géopolitiques majeurs
Le litige dépasse le cadre commercial. L’uranium nigérien demeure un élément clé de l’approvisionnement énergétique de la France, dont le parc nucléaire dépend en partie de ces importations. Pour Niamey, la bataille autour de Somaïr et d’Imouraren symbolise la volonté de rompre avec un modèle économique jugé déséquilibré, tout en affirmant une souveraineté renforcée depuis la prise de pouvoir militaire en 2023.
Une crise susceptible de redessiner les équilibres régionaux
Alors que les autorités nigériennes cherchent à diversifier leurs partenariats miniers, notamment vers de nouveaux acteurs asiatiques et moyen-orientaux, l’issue des procédures d’arbitrage pourrait déterminer la place d’Orano – et plus largement de la France – dans le secteur extractif nigérien. La visite présidentielle à Agadez envoie un message clair : le Niger entend poursuivre sa stratégie de contrôle intégral de son uranium, malgré les pressions juridiques et diplomatiques.
