Dans un entretien accordé au Monde des religions, le philosophe Denis Moreau, professeur à l’université de Nantes, établit un lien surprenant entre les tensions idéologiques actuelles et les anciennes hérésies du christianisme. Selon lui, notre époque, marquée par le rejet de l’universalisme et la montée du repli identitaire, réactive inconsciemment certains schémas de pensée issus des premiers siècles de la foi chrétienne.
Pour Denis Moreau, les débats contemporains sur la pureté militante ou la fragmentation sociale rappellent des doctrines autrefois condamnées par l’Église, comme le manichéisme ou le donatisme. Ces courants opposaient les « purs » aux « impurs », les « élus » au reste du monde — une logique que l’on retrouve aujourd’hui dans certains discours politiques et moraux.
Le philosophe estime que la modernité sécularisée, en croyant s’être affranchie de la religion, en reproduit paradoxalement certains réflexes. L’idée d’un salut individuel, d’une vérité exclusive ou d’une appartenance identitaire forte réapparaît sous des formes laïques, parfois militantes.
Son analyse invite à réfléchir sur la permanence des structures spirituelles dans la pensée contemporaine. Derrière les idéologies modernes se cachent, selon lui, des échos anciens que la société peine encore à reconnaître.
